De la viande de laboratoire ? L’alimentation mondiale évolue sans cesse et fait face à de plus en plus de défis, entre éthiques, écologie, changement climatique, et besoins corporels.
Les chercheurs développent des solutions aux problèmes actuels tout en continuant à rendre la nourriture accessible pour tous.
L’industrie de la viande est pointée du doigt pour être une industrie des plus polluantes. Les rejets de méthane sont 20 à 30 fois plus puissants en effet de serre que le CO2. Mais c’est aussi une industrie qui se retrouve très souvent au cœur de polémiques sur les conditions de traitement des animaux et leurs conditions de vie. De plus, 30% de l’espace libre sur la terre est utilisé à des fins de production de viande. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a estimé que la demande de viande augmenterait de 70% d’ici 2050.
Une importante industrie vĂ©gĂ©tarienne et vĂ©gan s’est alors dĂ©veloppĂ©e. C’est notamment le cas chez les grands acteurs de l’industrie de la viande, telles que Herta et Fleury Michon. Des produits similaires Ă la viande mais faits Ă partir de vĂ©gĂ©taux tels que du soja et du blĂ©.
Mais depuis peu, des chercheurs développent de la viande de laboratoire, de la véritable viande ne provenant pas d’animaux. Mais comment est-ce possible ? Et est-ce réellement une solution efficace ?
La viande de laboratoire, qu’est-ce que c’est ?
Aussi appelĂ©e viande cellulaire, viande cultivĂ©e ou “clean meat”, la viande de laboratoire est issue d’une culture de cellules animales. Ces cellules sont cultivĂ©es dans des biorĂ©acteurs Ă des densitĂ©s et des volumes Ă©levĂ©s. Les cellules y sont alimentĂ©es par un milieu de culture cellulaire riche en oxygène, vitamines, nutriments, acides aminĂ©s, glucose et sels inorganiques. L’ensemble est complĂ©tĂ© par des protĂ©ines et agents de croissances.
En 2013, Mark Post, pharmacologue nĂ©erlandais qui est professeur de physiologie vasculaire Ă l’UniversitĂ© de Maastricht, a prĂ©sentĂ© le premier burger Ă base de viande cellulaire. Cette avancĂ©e dans le milieu de l’industrie agroalimentaire a fait de nombreux adeptes chez les dĂ©fenseurs des animaux, mais surtout dans l’industrie. Une association a vu le jour en France qui a pour but d’informer et alimenter la rĂ©flexion sur l’agriculture cellulaire en France.
En 2018, l’administration américaine a établi un cadre réglementaire ouvrant la voie à la commercialisation de ces produits.
En France, des start-ups voient le jour et développent leur technologie de viande cellulaire. C’est le cas de Gourmey, start-up spécialisée dans le développement de foie gras cultivé en laboratoire. Ils ont réussi à lever 48 millions d’euros pour le développement du projet. Un financement très important pour une start-up européenne du secteur.
L’un des leaders dans le secteur de la viande cellulaire est cependant Aleph Farms, une société Israélienne, c’est aussi la première entreprise à avoir créé le premier steak fait à partir de cellules souches de vaches.
Cette mĂ©thode de production Ă©limine donc la nĂ©cessitĂ© d’Ă©lever et tuer des animaux pour l’alimentation. Elle apporte donc une rĂ©ponse aux problĂ©matiques du bien-ĂŞtre animal et des Ă©missions de gaz Ă effet de serre.
Viande végan ?
Théoriquement, consommer de la viande n’est bien évidemment pas végan. En effet, issues de cellules souches d’animaux, cette viande n’est donc pas comme la simili-viande faite à partir de soja ou de blé.
Cependant, la vision même du véganisme est de refuser l’exploitation d’animaux pour produire des aliments, des vêtements, etc. Hors ici, cette viande ne demande pas l’exploitation d’animaux pour la produire. Elle pourrait donc être considérée comme végan sauf si l’on considère l’exploitation des cellules souches comme une exploitation animale.
En outre, cette technologie remet en cause le principe même du véganisme. Chacun possède sa propre définition de ce mode de vie. Certains vont être végan pour lutter contre l’exploitation animale, et d’autres vont être végan pour sa propre santé. En effet, le véganisme peut aussi considérer la viande comme quelque chose de non nécessaire pour l’humain voir néfaste pour le corps humain. Surtout depuis que la viande rouge ait été mise en cause dans le développement de certains cancers et perturbations des humeurs.
Ce qui est sûr c’est que notre méthode de consommation évolue et est à l’aube d’une grande disruption.
Quel avenir pour la viande de laboratoire
Il n’existe pas encore de réelle usine de production de viande cellulaire à grande échelle. La recherche doit être perfectionnée avant de pouvoir lancer ce produit sur le marché. Les données concernant son impact environnemental restent encore un peu floues.
Néanmoins, toutes semblent converger vers le fait que la viande cultivée aura un impact environnemental bien plus faible que la viande de bœuf. De plus, son impact sur la santé a besoin d’être éclairci. En effet, le développement musculaire chez l’animal met plusieurs années à se développer, le volume musculaire croît lentement.
Dès lors, pour obtenir en quelques semaines, une viande que l’animal met plusieurs années à fabriquer, il est nécessaire de stimuler la prolifération des cellules par le biais d’hormones anabolisantes. Une hormone qui existe naturellement dans le corps humain et qui aide à la croissance musculaire. Elles peuvent donc être présentées à juste titre par l’industrie comme des « facteurs de croissance naturels ».
Cependant, une surexposition à ces hormones a des effets néfastes pour le corps humain. En Europe, l’usage d’hormones de croissance en agriculture est interdit depuis 1981. Ce bannissement a été confirmé en 2003 et validé par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) en 2007. Un avenir donc assez flou concernant la viande cellulaire.
De plus, l’UE a déjà bien balisé le chemin par lequel la viande cellulaire devra passer. Avec le règlement sur les nouveaux aliments, qui régit les autorisations à la mise sur le marché des aliments faits à partir de cultures de cellules. Le chemin s’annonce donc encore très long pour la viande de culture avant de pouvoir en retrouver dans nos assiettes.
Aux États-Unis l’entreprise Future Meat a déclaré lancer leur première ligne de production cette année avec un coût de production battant toute concurrence soit de 1.70$
Il est vrai qu’en France, la viande cultivĂ©e est assez peu soutenue par les pouvoirs publics. Et par rapport Ă de nombreux autres pays, y compris EuropĂ©ens, les Français sont globalement les moins enthousiastes Ă l’idĂ©e de consommer de la viande cultivĂ©e.
En outre, la viande de laboratoire a un avenir Ă la fois prometteur et flou. Elle apporte des solutions Ă des problĂ©matiques importantes mais en fait apparaĂ®tre des nouvelles notamment en ce qui concerne la santĂ©. Mais on peut dĂ©jĂ imaginer les grandes avancĂ©es que pourrait apporter cette dĂ©couverte mixĂ©e aux nouvelles technologies telles que l’impression 3D. C’est dĂ©jĂ le cas d’Aleph Farms qui se sont servi de l’impression 3D pour imprimer le premier steak Ă partir de cellules de vaches.